France Télécom est-elle responsable du suicide de ses employés? C'est la question que pose la justice française en lançant, jeudi, une information judiciaire sur une situation qui préoccupe tout le pays.
L'enquête vise France Télécom et trois de ses dirigeants. Il s'agit d'une première en France : jamais une réorganisation dans une entreprise n'a constitué une infraction pénale.
Elle doit permettre d'étudier l'importante restructuration mise en place par l'entreprise, en 2006, et déterminer si elle a poussé au suicide pas moins de 48 salariés.
C'est le nombre de victimes avancé par l'Union syndicale solidaire (SUD), une des plus importantes organisations au sein de l'entreprise. De son côté, France Télécom reconnaît que 32 employés se sont enlevé la vie entre 2008 et 2009.
L'hiver dernier, le syndicat a déposé une plainte formelle devant la justice et se dit en mesure de présenter des preuves concernant au moins 14 cas de suicides, tentatives de suicide et dépressions graves.
L'organisation syndicale se dit également convaincue de la responsabilité de France Télécom dans tous les autres cas de suicides d'employés survenus au cours des quatre dernières années.
Le plan « Next », le grand responsable
Au centre de toute cette histoire : le plan baptisé « Next », que France Télécom a appliqué en 2006.
« Next » était basé sur trois principes assez simples : simplicité, innovation et performance. Le géant européen des communications misait alors sur la convergence des services et espérait devenir, en trois ans, une référence dans son domaine, autant auprès de sa clientèle que de ses actionnaires.
Pour y arriver, France Télécom a dû supprimer 22 000 emplois et muter plus de 10 000 personnes vers un nouvel emploi ou une autre région.
Les premiers cas de suicides potentiellement liés à ce chambardement sont répertoriés dans les mois qui ont suivi sa mise en application. Depuis, des gestes malheureux font la manchette dans les médias nationaux presque chaque mois.
Dans un rapport remis en mars 2010, le bureau de l'Inspection du travail mentionne que les dirigeants de France Télécom ont « mis en danger la vie d'autrui » et ont fait du « harcèlement moral » pour arriver à leurs fins.
Le bureau ajoute que la réorganisation était « de nature à porter des atteintes graves à la santé des travailleurs ».Ce rapport, jumelée à plusieurs autres études menées depuis 2006, sera bientôt scruté à la loupe par la justice française dans le cadre de la procédure qui vient de s'enclencher.
Radio-Canada
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